L'isolée

LE LIVRE Margot a vingt ans. Elle est en prison. Elle ne parle pas. Elle écrit seulement. Pour résister à la folie ou pour mieux s'y réfugier. Pour reprendre aussi possession de son histoire : une enfance provinciale et catholique, les études à Paris, les grèves de 1995 où elle rencontre Pierre, ce fantôme qui l'accompagne et auquel elle tente de rendre chair. Ancien membre de LO, situationniste dissident, c'est un jeune homme sévère et exalté. A ses côtés elle fait l'expérience du militantisme gauchiste, puis seule, elle s'engage en faveur des sans-papiers. Fasciné par la froide passion pour la cause révolutionnaire de Pierre Goldman, Pierre s'éloigne de la vie ordinaire. Avec Margot, il s'enferme progressivement dans la solitude amoureuse et la révolte, jusqu'à la dérive violente. A ce temps du récit se mêle celui de la prison. On ignore si ce texte, qui la maintient vivante, doit perdre Margot ou la sauver. Mais le texte ne plaide pas, il ne fait que décrire le processus d'écart au réel. Il ne cherche qu'à comprendre la nécessité et l'impossibilité de la révolte, la douceur et la douleur du fanatisme, la logique, rigoureuse et paradoxale du refus. L'isolée est un beau roman sombre. L'écriture fiévreuse et passionnée nous entraîne dans la spirale de la marginalité et de la violence. A l'histoire tragique de Pierre et Margot répond le tragique de l'Histoire, avec ses éternels réfugiés.